Monsieur le Premier Ministre, Mesdames et Messieurs les Députés membres de la Commission des Affaires étrangères :
Je suis très honoré de l'occasion qui m'est offerte aujourd'hui de m'exprimer devant vous. Je vous remercie vivement de votre invitation.
En ma compagnie se trouve une délégation de l'American Jewish Committee qui vient de visiter plusieurs capitales européennes dans le but d'approfondir et d'étendre le dialogue transatlantique.
En préambule, permettez-moi de dire quelques mots sur l'American Jewish Committee.
Notre organisation a été créée voici y a près d'un siècle en réponse aux pogromes qui sévissaient alors contre les Juifs d'Europe de l'Est. Dès le début, l'AJC a poursuivi deux buts complémentaires. Le premier était d'assurer la sécurité des communautés juives, tant dans le monde qu'aux États-Unis, et de leur porter assistance. Le second, directement inspiré de la tradition prophétique du judaïsme, était d'apporter notre contribution au bon fonctionnement politique et social des sociétés où nous vivons.
En conséquence, durant tout le vingtième siècle et jusqu'à aujourd'hui, notre institution s'est impliquée profondément dans le combat pour défendre et étendre les droits de l'homme, les libertés individuelles, et la dignité de la personne humaine.
Ce faisant, nous avons puisé aux sources des valeurs les plus pérennes de la Révolution française. Nous n'avons pas oublié que la France, quand elle s'est tournée vers la démocratie, n'a pas hésité à accorder aux Juifs la pleine citoyenneté, donnant ainsi l'exemple au reste du monde.
Il n'est donc pas surprenant que nous nous placions fermement du côté d'un monde pluraliste, fondé sur des valeurs démocratiques de respect et de tolérance mutuels.
Mais nous nous trouvons engagés dans une course contre la montre.
D'une part se tiennent tout ceux qui veulent construire un monde harmonieux, dans lequel le développement politique, économique, technologique et social progresse tant au sein des nations qu'à travers des frontières de plus en plus ouvertes.
Mais de l'autre se trouvent ceux qui usent de la violence, en particulier au nom de la religion, pour nous maintenir dans un état de tension permanente. Si l'on peut dire que les conflits du vingtième siècle ont été largement le résultat de causes idéologiques, je crains bien que ceux du siècle présent ne soient eux causés par la religion, ou plus exactement par les abus de celle-ci.
Le professeur Samuel Huntington de Harvard a écrit un livre fameusement controversé, "Le Choc des civilisations". Je comprends ses raisons de choisir ce titre, mais je pense qu'il aurait été plus approprié de parler du "Choc dans les civilisations".
Car les lignes de faille ne se trouvent-elles pas, en réalité, au cœur même de certaines civilisations religieuses? Les membres de tel ou tel groupe rejetteront ainsi la validité d'autres croyances; se targueront d'un lien exclusif à un Être suprême; insisteront sur la centralité de la religion dans l'exercice du pouvoir de l'État; et justifieront ainsi l'emploi de la violence dans l'accomplissement de leur vision. Mais dans le même groupe, on trouvera aussi d'autre membres qui eux respectent la foi d'autrui tout en adhérant à la leur; qui considèrent que la religion est une affaire de conscience individuelle et non de politique étatique; et qui n'ont nul besoin de dénier à autrui ses convictions dans le seul but de mieux affirmer les leurs.
Ce qui rend cette question particulièrement urgente, c'est la réalité indéniable de notre entrée dans une ère d'accès facile aux armes de destruction massives pour tous ceux qui sont déterminés à imposer leurs vues obscurantistes. Nous avons déjà fait l'expérience des extrémités auxquelles de telles forces sont prêtes à aller. Il faudrait un défaut total d'imagination pour ne pas envisager les dangereuses éventualités qui menacent notre avenir immédiat.
C'est précisément pourquoi nous nous trouvons dans une course contre la montre, aux enjeux exorbitants.
A l'American Jewish Committee, nous sommes convaincus qu'il n'existe pas de façon simple, encore moins unique, de faire face aux défis qui nous attendent. Aucun individu, aucune nation n'a de monopole de la sagesse en ce domaine. En tant qu'hommes de bonne volonté, nous devons être à l'écoute les uns des autres, avec des oreilles et un esprit ouverts; et ainsi apprendre les uns des autres. Néanmoins, certaines choses nous semblent évidentes.
Les démocraties de la Terre ont créé quelque chose qui vaut la peine d'être défendu.
Pierre Mendès-France écrivait dans "La République moderne", “La démocratie est d’abord un état d’esprit.” Il avait évidemment raison.
Certains ont peut-être cédé à un tel relativisme moral et culturel qu'ils s'en trouvent aujourd'hui incapables de distinguer entre la liberté et la tyrannie, entre une société ouverte et une société d'oppression. D'autres sont en proie à une telle culpabilité, un tel embarras du confort qui est le leur au sein de nos nations démocratiques, qu'ils en sont poussés à idéaliser chaque société et chaque dirigeant qui s'opposent radicalement aux nôtres. Nous devons nous garder de céder ni à l'une, ni à l'autre de ces tentations.
Il est inacceptable que dans une société libre, des élus de la représentation nationale doivent vivre dans la clandestinité; ou que des femmes soient traitées en inférieures; ou que des professeurs en viennent à craindre d'enseigner certaines matières dans leurs classes; ou que des responsables religieux puissent prêcher la violence contre les sociétés mêmes dans lesquelles ils vivent; ou que des individus exigent de l'État un respect alors qu'ils sont incapables de reconnaître leurs propres obligations à la société; ou que n'importe quelle communauté puisse être désignée du doigt et attaquée à cause de sa religion, de son appartenance ethnique, de sa race ou de toute caractéristique distinctive.
La démocratie, quelles que soient ses imperfections, a libéré le potentiel de l'être humain comme nul autre système. Elle a apporté la démonstration éclatante que la liberté et la dignité sont indivisibles pour tous les membres de la race humaine. Et quand il arrive à la démocratie de faillir, elle a ses propres mécanismes de correction. Enfin, oui, la démocratie a construit de larges régions de paix et de prospérité sur la planète.
Parmi ces vastes régions, le développement de l'Europe de l'après-guerre se distingue particulièrement. L'évolution de l'Union européenne, depuis le rêve de Robert Schuman et de Jean Monnet jusqu'à sa réalité actuelle, est extraordinaire. La guerre est aujourd'hui impensable entre les nations membres de l'Union. Vous avez montré au monde ce que l'on peut réussir quand des hommes d'État ont la vision et le courage nécessaires pour dépasser la gestion quotidienne et élever leur regard vers de plus larges horizons. En conséquence, vous avez beaucoup à partager avec d'autres régions du monde, voisines ou éloignées, qui pourraient bénéficier d'expériences d'une audace comparable.
Ainsi que l'Europe l'a prouvé au cours des cinquante-cinq dernières années, nous augmentons d'autant nos chances de succès devant les défis planétaires que nos nations démocratiques savent travailler à l'unisson, et non dans la cacophonie. Il est bien évident que les intérêts nationaux et régionaux ne convergent pas toujours exactement – comment en serait-il d'ailleurs autrement? – mais nous ne devrions jamais perdre de vue les plus larges enjeux. Nos adversaires communs tirent seuls avantage de nos divisions et de notre discorde. Inversement, quand nous sommes unis face à nos objectifs, il n'est pas de limite à ce que nous pouvons réussir.
Il y a des moments où aucune alternative n'existe à l'usage de la force, comme par exemple pour notre action commune en 1991 en expulsant l'armée irakienne de son occupation éhontée du Koweït, ou, plus récemment, en libérant l'Afghanistan de l'emprise des Talibans, mettant ainsi fin à son rôle de premier sanctuaire terroriste de la planète. La force doit toujours être le recours ultime, mais il vient des moments où elle devient inévitable, car l'alternative est encore moins acceptable. Si les ennemis de nos modes de vie et de nos systèmes de valeurs communs nous estiment faibles, irrésolus, ou indécis, ils n'hésiteront pas à nous défier, et nous paierons alors un lourd tribut.
A d'autres moment, la persuasion diplomatique peut être plus adaptée que la puissance militaire; mais là encore, l'élément essentiel est l'unité. Lorsque le Conseil de Sécurité des Nations unies, mené par la France et les États-Unis, parle d'une seule voix en demandant à la Syrie de mettre fin, une fois pour toutes, à la présence de son armée et de ses services spéciaux au Liban, il semble que cela soit suivi d'effet.
Nus devons aussi, enfin, encourager de façon constante et soutenue le développement politique, social et économique des pays qui ont peiné à mettre derrière eux l'héritage du colonialisme, ou sont victimes de corruption endémique, ou de gouvernements autocratiques, ou de carences de l'attention et du soutien des pays développés, ou de l'addition de plusieurs de ces facteurs.
Permettez-moi de dire que si le développement de ces pays est dans leur propre intérêt, il n'en est pas moins du nôtre. Mais nous n'y parviendrons que si, tels les grands hommes d'État de l'après-guerre, nous savons penser avec audace et agir collectivement, et si nous résistons à la tentation de ne penser qu'à court terme, à ne voir que les avantages immédiats à accepter le statu quo.
Certains aujourd'hui mettent en doute la valeur du partenariat transatlantique, ou d'ailleurs expriment leur profond scepticisme quant à l'avenir de la relation franco-américaine. Ceux d'entre nous qui, des deux côtés de l'Atlantique, croient en ce lien – et pas uniquement pour des raisons de nostalgie historique, encore qu'il existe une histoire riche de signification entre nos deux pays – doivent aujourd'hui se dresser et se faire entendre.
L'American Jewish Committee est à cet égard un partisan convaincu de ce partenariat. On nous traitera peut-être de naïfs, déconnectés de la réalité. Tant pis. Nous continuerons à élever la voix en faveur des liens les plus étroits possibles entre l'Europe et les États-Unis, au service des plus hauts intérêts d'un monde en paix, et en tant que meilleurs garants de la construction d'une planète démocratique, ouverte, et prospère.
C'est précisément dans ce but que, voici juste un peu plus d'un an, en présence de Javier Solana, d'Ana Palacio, de Noëlle Lenoir, et de bien d'autres personnalités européennes représentant tant l'Union européenne que ses gouvernements nationaux; l'AJC a ouvert l' Institut Transatlantique à Bruxelles. Nous voulions démontrer concrètement qu'à ce moment critique de l'histoire, nous savions reconnaître les périls menaçants de la dérive et de la discorde – et que nous acceptions notre obligation d'aider à préserver le front des démocraties.
Nous n'ignorons pas que des divergences se sont déjà manifestées par le passé entre nos deux continents. Considérons un instant ce commentaire extrait d'un compte rendu, pour la revue Commentary (revue publiée sous les auspices de l'American Jewish Committee) de l'ouvrage de Luigi Barzini, "Les Européens": "L'Alliance atlantique est-elle menacée d'explosion? Les signes sont certainement inquiétants. Impossibilité pour l'instant de parvenir à une politique de défense commune... Discorde continuelle sur les questions monétaires. Hors de la zone atlantique propre, dans des régions cruciales comme le Moyen-Orient, les alliés supposés se contrecarrent en réalité plus souvent qu'ils ne s'épaulent... Les États-Unis, selon les Européens, mènent leur politique étrangère de façon impulsive et imprévisible... Du point de vue américain, les Européens rechignent à assumer leur part du fardeau commun, et sont trop enclins à dépenser leurs budgets en mesures sociales de solidarité plutôt que sur la défense." La date de l'article? 1983.
Les optimistes diront que, en dépit des divergences, l'alliance a largement tenu le coup, survivant même à la fin de la Guerre froide. Les pessimistes rétorqueront: "Plus ça change, et plus c’est la même chose." En fin de compte, je me range du côté des optimistes.
Nous sommes bien conscients qu'il y a eu de sérieuses divergences de vues sur une série de questions ces dernières années, y compris le conflit israélo-arabe. Tout en partageant l'objectif d'une solution pacifique du conflit fondée sur la coexistence de deux États indépendants, nous ne saurions nous cacher l'existence de tensions, encore qu'il me semble raisonnable d'espérer que ces tensions se sont trouvées réduites lors des mois écoulés. De fait, la mort de Yasser Arafat et l'élection de Mahmoud Abbas en tant que président de l'Autorité palestinienne ont ouvert une fenêtre d'opportunité. Il nous semble aussi que s'est trouvé révélé, par contraste, l'échec total de l'ère Arafat, au cours de laquelle Israël comme les États-Unis se sont convaincus qu'il n'était pas possible de faire la paix sans l'avènement d'un nouveau leadership palestinien – alors que d'autres, dont la France, tenaient un raisonnement différent.
Nous sommes profondément convaincus qu'aucune nation ne recherche la paix avec plus d'ardeur qu'Israël, et qu'aucune nation n'a pris plus de risques tangibles pour parvenir à la paix avec ses voisins qu'Israël. Et nous sommes bien conscients qu'il faut être deux pour faire la paix.
Lorsqu'un véritable partenaire pour la paix s'est matérialisé, comme dans le cas de l'Égypte et de la Jordanie, la paix avec Israël est devenue une réalité. Et si demain un partenaire de bonne volonté émerge au sein l'Autorité palestinienne, rôle que nous espérons vivement voir tenu par le président Abbas, la paix deviendra à nouveau réalité. Mais nous ne devons pas nous laisser tenter de prendre nos désirs pour des réalités. Il faut savoir rester conscients des faits objectifs. Nous verrons avec le temps si le président Abbas a non seulement la volonté, mais aussi la capacité de maintenir son autorité, tout particulièrement sur les factions extrémistes et armées palestiniennes. Si c'est le cas, alors il y aura de véritables raisons d'espérer pour l'avenir des Israéliens comme des Palestiniens.
Monsieur le Premier Ministre, Mesdames et Messieurs les membres de la Commission :
Je m'adresse à vous en tant que fils des États-Unis et petit-fils de l'Europe, tout particulièrement de la France. Mes parents, nés sous d'autres cieux, trouvèrent tous les deux refuge en France, ma mère chassée par le communisme, mon père par le nazisme. Leur seule langue commune était le français. Comme tous les autres membres de ma famille, ils s'adaptèrent rapidement aux valeurs républicaines de votre grand pays. Ils accueillirent la France tout comme la France les avait accueillis.
Puis vinrent la guerre, l'invasion, l'Occupation, le régime de Vichy, les rafles et les déportations, la fuite, et la Résistance. À la fin de ces épreuves, ma famille, dont la plupart des membres avaient heureusement survécu, se trouvaient parsemée en France, aux États-Unis, et dans ce qui allait devenir Israël.
Bien qu'éparpillés entre ces trois pays, il s'estimaient tous heureux. Après tout, ils vivaient dans des nations démocratiques, liées par un engagement commun aux valeurs fondamentales qui leur permettaient, à eux et à leurs concitoyens, de prospérer enfin dans un climat délivré de l'ombre inquiétante de la persécution – et cela même si Israël devait faire face à des menaces à son existence même de la part de voisins hostiles, tout comme c'est encore le cas de la part de l'Iran et de groupes terroristes comme le Hezbollah, le Hamas et la Jihad Islamique.
Mais aujourd'hui, de nouvelles ombres se profilent, propres à nous préoccuper. En particulier, l'accroissement d'incidents de violences antisémites, tant verbales que physiques, certes non limité à un seul pays, mais très marqué en France, fait réfléchir. Le sentiment croissant d'insécurité pour ces motifs est malheureusement confirmé par les statistiques officielles, qui indiquent que l'on a atteint le chiffre le plus élevé d'incidents antisémites jamais comptabilisés en France depuis 1990, date à laquelle leur recensement a commencé. Et ce sentiment est renforcé par maintes conversations avec des personnes qui se sont trouvées être directement l'objet d'intimidations, de violences verbales ou physiques.
Quelle qu'en soit la source, qu'il s'agisse d'extrémistes islamistes qui parlent une langue génocidaire; ou d'antisionistes qui cherchent à dénier au peuple juif, et à lui seul, son droit à l'autodétermination, dans le but de faire de notre planète, selon l'expression de l'ancien vice-Premier Ministre suédois Per Ahlmark, un monde “Judenstadtrein,” nettoyé de son État juif; ou encore de l'extrême-droite qui retrouve ses démons habituels en qualifiant les Juifs, une fois de plus, de "cosmopolites", de "sinistre cabale", ou de "sous-hommes"; ou encore de négationnistes qui espèrent banaliser ou faire disparaître la mémoire de la Shoah et comptent sur la disparition progressive des survivants pour capturer l'esprit des jeunes générations; ou de ceux dont l'obsession anti-israélienne atteint de tels sommets qu'ils ne peuvent plus dépeindre l'État hébreu ou ses partisans qu'en termes suant une haine grotesque, la menace est bien réelle.
Et si l'on considère la disponibilité des nouvelles technologies, chaînes par satellite, Internet, tout ceci dans un environnement aux frontières de plus en plus poreuses, force est de constater que ce qui constituait encore récemment une série de problèmes nationaux s'est transformé en question transnationale, nécessitant une coopération internationale renforcée.
Grâce aux visites répétées que nous avons effectuées, grâce à nos rencontres tant avec des représentant officiels qu'avec des dirigeants des institutions juives, grâce enfin au rétablissement d'une présence permanente ici, nous sommes tout à fait au courant des mesures prises par la France ces dernières années, sous la direction du président Chirac et du Premier Ministre, Monsieur Raffarin, ainsi que par d'autres pays européens et par l'Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe, afin de faire face à ces problèmes grandissants. Nous apprécions à leur juste valeur ces efforts, y compris la décision d'interdire les émissions racistes et incendiaires d'au moins deux stations de télévision provenant du Moyen-Orient. De telles mesures sont nécessaires, tout à la fois pour protéger les communautés juives des dangers qui les assaillent, et pour défendre nos sociétés du risque très réel que ce qui a commencé par de l'antisémitisme devienne très vite un assaut concerté contre toutes les valeurs qui fondent ces sociétés. N'oublions jamais que l'antisémitisme commence certes avec les Juifs, mais que l'histoire nous a enseigné qu'il ne s'arrête jamais seulement aux Juifs.
Nous vous encourageons instamment à poursuivre avec vigueur votre lutte contre l'antisémitisme, que ce soit dans le système scolaire, dans les rues, dans les média, ou à tout endroit où la bête immonde relèverait la tête. Nous ne savons que trop bien que ce genre de combat n'est gagné ni facilement, ni rapidement, mais nous comptons beaucoup sur le fait que la France a bien compris l'importance des enjeux, et a la volonté de persévérer.
Pour notre part, nous sommes prêts à vous aider si vous nous le demandez. Nous avons près d'un siècle d'expérience dans la lutte contre l'antisémitisme et contre toutes les discriminations, chez nous comme au niveau international, ce qui nous a donné l'occasion de comprendre quelles approches politiques, civiques, légales, policières, éducatives et autres ont le plus (et le moins) de chances de succès.
Il s'agit ici d'une autre et plus large débat. Cependant, permettez-moi de mentionner deux éléments de base que nous avons appris au cours de notre travail de lutte contre l'antisémitisme.
D'abord, il est absolument essentiel que les dirigeant politiques se fassent entendre. Ils doivent manifester une fermeté absolue, tant en paroles qu'en actes. Nul ne doit douter un seul instant de leur détermination à se dresser contre l'antisémitisme.
Ensuite, tout exemple recensé d'incident antisémite ne doit jamais être nié; son traitement ne doit faire l'objet d'aucun délai et d'aucune manœuvre dilatoire, visant par exemple à le classifier différemment. Je dois dire à cet égard que mon expérience personnelle des réactions de certains officiels en France durant les années 2000 et 2001 m'avait causé une certaine déception. Pour des raisons que je ne chercherai pas à élucider, ils ne saisissaient pas du tout la signification de ce qui était en train de se passer, tandis que les délinquants se persuadaient en revanche de leur impunité, et que les victimes se sentaient abandonnées à la peur. Les changements que nous avons constatés dans la reconnaissance officielle de la nature et de la gravité de ce problème – la menace très réelle aux citoyens français juifs et à la France elle-même – sont très frappants, et nous les apprécions à leur juste valeur.
Enfin, permettez-moi de dire à quel point je considère important le dialogue entre nos deux pays, et entre la France et la communauté juive américaine Ayant participé à ce dialogue depuis de nombreuses années, je peux témoigner personnellement de sa portée.
Soyez assurés qu'à l'American Jewish Committee, nous sommes fermement engagés à élargir et à renforcer les points de contact entre nous. Nous considérons qu'il est vital de créer un plus grand nombre d'occasions d'approfondir notre compréhension mutuelle, d'explorer les questions sur lesquelles nous divergeons, et de déterminer les domaines dans lesquels nous pouvons coopérer mutuellement.
Nous continuerons aussi à aider le public américain à comprendre que nous avons nous-mêmes intérêt à votre succès dans les défis auxquels vous faites face, et à renforcer le plus possible les liens entre Paris et Washington.
Prononçant ces paroles, je me rends bien compte, comme j'y ai fait allusion il y a quelques instants, qu'il existe un fossé entre les perceptions respectives de la France et des États-Unis. Ceci est tout aussi vrai des perceptions entre la France et la communauté juive américaine. Du point de vue des Juifs américains, si l'on en croit nos sondages nationaux, le sentiment général est que la France, de tous les grands pays européens, est celui qui a l'attitude la plus glaciale à l'égard d'Israël. De plus, les mêmes sondages révèlent c'est la France que l'on considère comme étant le foyer d'antisémitisme le plus virulent d'Europe.
Ces questions, comme d'autres encore, qui vont de la façon de traiter le Hezbollah à la réponse la plus appropriée devant l'appétit nucléaire de l'Iran, seront assurément le mieux traitées au cours d'une discussion franche et ouverte, comme il sied à des amis.
Monsieur le Premier Ministre, Mesdames et Messieurs les Députés membres de la Commission des Affaires étrangères, permettez-moi de conclure en vous exprimant toute mon appréciation de l'honneur que vous m'avez fait en m'invitant ici aujourd'hui. Soyez assurés de mon admiration pour le remarquable travail que vous avez entrepris, et de mon espoir que l'amitié sera toujours la note dominante des relations entre nos deux pays.
Discours David Harris à l'Assemblée Nationale, avril 2005
Déclaration de M. David A. Harris Directeur Exécutif de l'American Jewish Committee devant la Commission des Affaires étrangères de l'Assemblée nationale
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